Le complot contre Jules César

Publié le : 25 avril 20198 mins de lecture

En octobre 45 av. J.-C. les rues de Rome accueillent le triomphe grandiose de Jules César, de retour de sa campagne d’Espagne. Celui que les soldats ont nommé « imperator titre attribué aux généraux romains victorieux, est acclamé par ses soldats sous l’œil inquiet des sénateurs. La bataille de Munda a définitivement mis à terre Pompée le Jeune et Titus Labienus, ses derniers rivaux dans la guerre civile qui fait rage depuis quatre années. En l’absence de contrepoids politique, plus rien n’empêche la dictature. Déjà circulent des rumeurs de complot Le meurtre de César, s’il met un terme à l’ascension d’un homme, va renforcer son aura et précipiter la fin de la République romaine.

Grand stratège et politicien nabiie, Jules César a marqué de son empreinte l’histoire de Rome. Au cours de ses campagnes, il a repoussé les frontières romaines jusqu’au Rhin contre les redoutables tribus germaniques et jusqu’il océan Atlantique en conquérant la Gaule. Homme politique ambitieux et brillant, il s’est appuyé sur un courant réformateur et démagogue, la « plèbe ». Par le passé, il n’a pas hésité à utiliser la force pour s’emparer du pouvoir, notamment en janvier 49 av. J.-C., lorsqu’il a franchi le fleuve Rubicon avec ses légions pour investir Rome. La guerre civile romaine achevée sur une victoire de ses légions, Jules César reçoit les pleins pouvoirs pour dix ans – avec le titre de « dictator ». Omniprésent dans le paysage politique romain, il devient la cible des accusations traditionnellement portées par les conservateurs lorsqu’un homme se montre trop favorable aux revendications populaires. Certains sénateurs, les très conservateurs « patriciens », se sentent préoccupés par les conséquences du triomphe d’octobre 45 av. J.-C., le cinquième de Jules César en dix ans. Et pour cause : fort de I’ « imperium », le consul s’embarrasse bien peu des usages de la République.

La popularité de Jules César effraie le Sénat

En 44 av. J.-C., certains bruits courent à Rome et alarment la frange conservatrice du Sénat : César envisagerait de venger la déroute des légions de Crassus (53 av. J.-C.) en se portant contre les Parthes, peuple du Moyen-Orient qui menace les provinces romaines de Judée, de Syrie et d’Asie mineure. Or, selon la prophétie des Livres sibyllins, seul un roi pourrait réussir cette entreprise. En cas de victoire, plus rien ni personne ne pourrait s’opposer à ses ambitions totalitaires. Le 26 janvier, revenant d’Albe, où il a présidé les Fériés latines. César est salué sur son chemin du titre de roi. Son attitude exemplaire ne fait qu’accroître sa popularité. Le 15 février, il refuse publiquement cette dignité en repoussant à deux reprises le diadème royal que lui tend Marc Antoine, son fidèle lieutenant. Pendant la nuit, un diadème factice est disposé sur la tête de sa statue, accompagné de bandeaux royaux. Furieux, les tribuns Epidius Marullus et Caesetius Flavus arrachent ces insignes. Leur destitution immédiate par César est interprétée par les patriciens comme une déclaration de guerre. Il n’y a plus aucune alternative : pour la survie de la République, Jules César doit mourir.

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Un meurtre pour la survie de la République

Le 14 février 44 av. J.-C., le Sénat confère à César la dictature perpétuelle. Les réformes brutales qu’entreprend César vont bouleverser l’ordre social de la République romaine. Il recompose les effectifs du Sénat. Les grandes familles politiques voient des hommes de basse extraction, esclaves et affranchis, notamment des Gaulois cisalpins et des Espagnols, accéder aux charges qui jadis leur étaient réservées. Désirant mettre un terme à la corruption politique et à l’impact de celle-ci sur les finances des provinces, César s’arroge le droit de nommer les magistrats de haut rang. Il désigne comme prêteurs (administrateurs de justice) son fils adoptif Marcus Junius Brutus, Marc Antoine et Caius Cassius Longinus, un proche de Pompée rallié à sa cause. Longinus, qui espérait une nomination au consulat, est déçu de la charge qu’il reçoit. Il réunit autour de lui d’anciens pompéiens hostiles à la personne de César, mais également des vétérans des dernières campagnes militaires romaines inquiets de la perspective d’une nouvelle guerre contre les Parthes. Le ralliement de Brutus, présenté par Cassius comme l’inspirateur du complot, permet de fédérer d’autres opposants plus modérés.

Les Ides de Mars, acte fondateur de l’Empire

La date du meurtre est fixée au début de la réunion du Sénat dans la Curia Pompeia, sur le champ de Mars. Marc Antoine, seul capable de défendre César, est attiré à l’écart, tandis que le groupe des conjurés cerne sa victime. Metellus s’assure que César ne porte aucune protection en relevant sa toge. C’est le signal : assailli de toutes parts, le grand général tombe, transpercé de 23 coups de poignard – 35 selon certaines sources. Lorsque, gisant à terre, il voit Bru tus accourir vers lui armé, il prend conscience de l’ampleur de la trahison. Les derniers mots de César sont pour lui : « Toi aussi, mon fils…» Sans hésiter, Brutus l’achève. Le 20 mars, un bûcher est dressé sur le champ de Mars, près de la tombe de la fille du dictateur, Julia. Le corps de César, couché sur un lit d’ivoire orné de pourpre et d’or, est déposé dans une chapelle édifiée sur la place du Forum. À sa tête est placée sa toge ensanglantée. Marc Antoine fait lire, en guise d’oraison funèbre, la liste des honneurs qui lui ont été dévolus au cours de sa vie. La foule se masse spontanément, arrache le bois des boutiques du forum pour composer un bucher d’apothéose, dans un recueillement absolu.

Premier assassinat politique connu, le complot contre Jules César est, contre les attentes de ceux qui l’ont fomenté, un événement fondateur du régime impérial romain. À sa mort, un nouveau triumvirat se hisse au pouvoir. Composé de personnages ambitieux, ce gouvernement instable précipite Rome dans une longue guerre civile. Marc Antoine, épargné par Brutus, mène le parti césarien contre les assassins de son mentor. Octave l’emporte en 31 av. J.-C. et prend le titre d’Auguste », dépositaire de tous les pouvoirs. Il poursuit les réformes de César, organisant un État autoritaire mais pacifié.

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